dimanche 29 avril 2007

Ciudad Juarez, la cité des mortes

Les films engagés font recette et c'est l'une des raisons pour laquelle Hollywood et toute l'industrie cinématographique soutiennent ces réalisateurs qui ne trouvaient il y a peu que leur propre écho.


L'un des derniers en date actuellement à l'affiche est « Les Oubliées de Juarez », réalisé par Gregory Nava avec Jennifer Lopez et Antonio Banderas. Voici le synopsis : « Une journaliste enquête sur une série de meurtres commis aux abords d'usines américaines situées à la frontière de Juarez et d'El Paso. Entre les intérêts américains, les pot de vins et la collusion des notables mexicains locaux, les pistes vont s'avérer dangereuses pour la journaliste téméraire... » Le scénario n'est pas très recherché rappelant Erin Brockovich mais l'histoire est bien réelle. Les critiques ne sont pas tendres avec le film. Malgré un ours d'or au festival de Berlin, le film c'est fait hué. Le public d'un festival est-il légitime? Bref il en ressort générallement que les films engagés n'ont plus comme but ultime de dénoncer, de faire connaître, de rendre compte, de protester... mais de faire de l'argent. Je ne pense pas qu'il faut remettre en cause la volonté du réalisateur mais des partenaires financiers qui rôdent autours et qui dans un soucis de rentabilité dénaturent le film.

L'affaire Ciudad Juarez nécessite plus qu'un film. Elle n'est pas nouvelle. Depuis 1993 plus de 700 femmes ont trouvée la mort selon un rituel immuable: enlèvement, torture, sévices sexuels, mutilations, strangulations. Dans cette ville du nord du Mexique, il est question de féminicide.

Pourquoi cette ville connait elle une telle affaire criminelle ? Que font les autorités mexicaines et internationnales ? Qui sont les coupables et pourquoi ne sont ils pas arretés depuis ? Combien de femmes sont réellement mortes à Ciudad Juarez ?


Description de la maison du diable

Longtemps, Ciudad Juárez est restée une petite ville. Les gens y vivaient du commerce et de la culture du coton. Tout a commencé à changer il y a une trentaine d'années. Personne ne connaît plus aujourd'hui le nombre exact d'habitants de la ville : un million et demi ? deux millions ? deux millions et demi ? D'ailleurs, qui pourraient les compter ? La ville grandit de plus en plus mordant chaque jour un peu plus sur le désert alentour. Les paysans mexicains du sud du pays abandonnent leur travail dans des plantations qui ne leur appartiennent pas (vingt heures de labeur en plein soleil pour 1 dollar par jour) et montent vers le nord, dans l'espoir de pouvoir traverser la frontière avec le Texas. Ce n'est pas si facile. Les Américains ont édifié un mur métallique qu'ils gardent extrêmement bien. La plupart s'entasse à Ciudad Juarez, dans le quartier de Anapra sur les hauteurs de la ville. Les gratte-ciel d'El Paso, la ville jumelle du coté des Etats-Unis, les narguent inlassablement. Ciudad Juarez est une ville close où se cotoient les candidats à l'émigrations, les chercheurs du rêve américain, les barons de la drogue et les ouvriers des « maquiladoras ». A l'est de la ville se trouvent les maquiladoras, des usines d'assemblage de sous-traitance des multinationales où la mains d'oeuvre coûte dix fois moins de ce coté de la frontière.Ce sont surtout des jeunes femmes qui travaillent dans les maquiladoras. Les ouvrières se lèvent au milieu de la nuit pour traverser le désert noir et froid. Ce sont celles qui forment la première équipe. Elles arrêtent l'autobus et vont à l'autre bout de la ville.

C'est une ville frontière, une "border town", victime de la mondialisation où se déroule la plus grande affaire criminelle de tout les temps. Cette affaire lui donne le statut de la ville la plus dangereuse au monde pour les femmes. Nous pouvons même créer un néologisme et parler de féminicide.

« Vendredi. Les ouvrières arrêtent leur travail, se dépêchent de se changer, se maquillent, enfilent leur plus belle robe. Ce soir, elles vont danser dans le centre-ville. Elles n'ont pas 100 pesos, mais elles entrent gratuitement dans les discothèques, contrairement aux hommes, qui doivent payer. Elles n'ont pas de quoi s'offrir une boisson, elles cherchent du regard ces hommes qui paient volontiers. La musique est forte, les gens dansent, on est à l'étroit, l'atmosphère est chaude et étouffante, il y a de plus en plus d'alcool, de drogues. Il y a aussi un hôtel bon marché au coin de la rue. Les gens d'ici disent que tout ce qui est illégal dans le monde se trouve le soir dans le centre de Ciudad Juárez. C'est peut-être pour cette raison que le diable aime venir ici : il kidnappe les filles (ou il envoie ses émissaires), il les séquestre, il torture, il viole et il étrangle.


Le diable ou l'impunité ?

Certains disent que le diable s'est installé dans la ville. Depuis 1993, 380 femmes ont été enlevées, violées et assassinées et 800 femmes ont disparues sans que la police trouve (ou cherche à trouver) les différends tueurs. Des agents du FBI expert en crime en série, des envoyés de l'ONU ont bien enquêté sur le terrains mais sans aucun résultat. La police investie sur la tragédie depuis plus de douze ans avoir arrêté les coupables des meurtres ou trouvé des explications convaincantes. La police manifeste d'une incompétence totale avec un double discours. Les autorités fabriquent des faux coupables, comme Latif Sharif, cet égyptien accusé d'être un sérial killer, pour calmer la population. Il y a une refus des autorités de voir qu'un problème existe. Il n'y a pas de volonté politique. Il a fallu 10 ans pour reconnaître la tragédie. La police est médiéval avec une culture patriarcale et très machiste. Lorsque des mères de différents quartiers ont signalé la disparition de leurs filles, la police leur a répondu de manière rassurante : les filles aiment s'amuser, elles vont revenir, elles ont certainement trouvé un fiancé. Les mères ont expliqué que c'était impossible, qu'elles connaissaient leurs filles. "Alors cherchez-les".

Certains disent que les policiers participent aux assassinats que le diable se balade en uniforme.

Malgré les fausses accusations et arrestations, les disparitions continuent au rytme de une à deux par semaine. Frappant toujours des familles pauvres. Le diable sait qu'il ne faut pas toucher aux filles des familles riches. Le diable sait qu'on ne punit pas l'assassin des pauvres. Les gens l'ont vite compris : les autorités ne veulent pas mettre la main sur l'assassin. Tout le monde sait ici - et c'est également évoqué dans de nombreux rapports internationaux - que la corruption de la justice mexicaine a atteint un niveau difficile à imaginer. La police, les procureurs, les juges sont achetés par la mafia et mieux vaut se taire. On menace les femmes de ceux qui ont été emprisonnés à tort, on menace les journalistes trop curieux (quelques-uns ont disparu sans laisser de traces), on menace d'anciens directeurs de prison qui parlent ouvertement des tortures, on menace les avocats qui répètent que le système est corrompu et favorise les agissements des tueurs en série. On leur coupe la route, on sabote les freins de leurs voitures, on leur envoie des oiseaux morts, on braque des phares allumés sur leurs fenêtres au beau milieu de la nuit. L'avocat de Bianca a été descendu par la police quand il roulait en voiture, un jour très ensoleillé. Selon la version officielle, les policiers se sont trompés, ils l'ont pris pour un trafiquant de drogue. De telles méprises arrivent au Mexique, cela n'a rien d'extraordinaire.


Le journaliste Wojciech Tochman raconte dans un article de la Gazeta Wyborcza, comment l'on fabrique les coupables.

« Miriam Evelyn, 29 ans, deux enfants en bas âge. L'eau courante a été coupée. Elle n'a pas pu payer la facture. Sa vie a basculé en quelques minutes, un soir d'automne 2001, juste après qu'on eut découvert les huit corps de femmes à Paso de la Victoria. Son mari était chauffeur de la ligne A1. "Ce soir-là, raconte Miriam Evelyn, il est rentré tôt." Il s'apprêtait à dîner avec les enfants quand on a frappé à la porte. "Victor Javier Garcia ?" demanda une voix inconnue. "Lui-même", a répondu le mari, recevant immédiatement un coup sur la figure. Il a été attrapé par la chemise, traîné devant la maison, projeté contre une voiture. Il y avait une trentaine de voitures particulières, et beaucoup de monde. Personne ne s'est présenté, ni n'a dit de quoi il s'agissait. Ils ont battu Victor, ils lui ont mis un revolver sur la tempe. Miriam, un enfant sous le bras, n'a pas compris ce qui se passait, elle criait. Eux aussi ont crié. Ils l'ont insultée. Ils ont embarqué Victor de force dans la voiture et sont partis. Miriam Evelyn a d'abord pensé qu'ils voulaient une rançon, cela arrive au Mexique. Elle s'est dit qu'elle ne reverrait jamais son mari, qu'elle n'aurait pas assez d'argent pour le racheter. Elle a couru à la police, puis chez le procureur. Personne n'a voulu l'aider. Elle est rentrée chez elle et, ne tenant pas en place, elle est retournée voir le procureur. Les policiers ont finalement accepté sa déposition. Ils ont demandé des détails sur le signalement des ravisseurs et des voitures, ils lui ont promis de chercher Victor et lui ont proposé de les accompagner. Ils ont fait un long tour de la ville, ils l'ont menacée avec une arme et lui ont ordonné de se taire et d'attendre, avant de l'abandonner au milieu d'une rue obscure. Le lendemain, elle a été convoquée pour identifier des restes calcinés. "Ce n'est pas mon mari", a-t-elle dit sans être vraiment convaincue. Elle a encore fait le tour des commissariats et des institutions, appelant à l'aide. Finalement, elle s'est rendue à l'Académie de police, au sud de la ville. Elle ne le savait pas encore, mais c'est ici qu'opère une section spéciale chargée d'élucider les assassinats de femmes. Le policier avec qui elle a parlé avait une matraque dans la main (électrique, mais à l'époque elle l'ignorait). Du couloir, elle a aperçu un autre homme assis sur un tabouret qui lui faisait des signes de la main. Il avait la tête ceinte d'un bandage, il ne portait pas les vêtements de son mari, elle n'a pas imaginé que cela pouvait être lui. (Les victimes de tortures ont les vêtements tellement couverts de sang qu'on leur en donne des neufs pour se changer.) Revenue à la maison, elle a vu son mari à la télé. Le visage enflé et couvert d'ecchymoses, il était accusé du viol et du meurtre des huit femmes retrouvées quelques jours avant dans le champ de coton. Face aux caméras, les procureurs ont dit : les meurtriers en série ont été arrêtés, le drame est terminé. Femmes de Ciudad Juárez, soyez en sécurité. Miriam a compris qu'il n'y avait plus personne à qui demander de l'aide. Elle a eu peur. Combien de temps Victor allait-il tenir sous la torture ? Comment payer les factures et la nourriture pour les enfants ?

Les policiers ont torturé Victor car ils voulaient qu'il donne les noms de ses complices (a priori, ils ont pensé qu'il devait en avoir). Ils l'ont battu et lui ont brûlé les parties génitales avec des matraques électriques. Il a dit le premier nom qui lui est venu à l'esprit, celui d'un collègue de travail qu'il avait salué quand leurs bus se sont croisés. C'était Gustavo González Lopez, mari de Bianca Guadalupe Lopez. Depuis peu, Bianca porte le deuil de son mari. Elle dit que Dieu doit lui donner des forces pour continuer, qu'elle doit vivre pour ses enfants. Elle a 23 ans. Elle en avait 16 quand elle est allée travailler à l'usine. Tous les jours, elle prenait le même bus, et c'est là qu'elle a rencontré cet homme un peu plus âgé et un peu rond. Il l'a draguée avec respect (ce qui est rare par ici). Ils se sont mariés. Quinze jours plus tard, elle a pu voir son mari (Miriam Evelyn aussi), qui lui a raconté les tortures, les matraques électriques et tout le reste. On les a obligés à avouer les huit meurtres, mais leurs épouses savent qu'ils sont innocents. Ils ont tout reconnu. Ils n'ont jamais été entendus ensemble, mais leurs dépositions sont précises et identiques : noms des victimes et leurs adresses, détails de leur habillement, descriptions des enlèvements, des tortures, des assassinats.»


De nombreuses hypothèses circulent à Ciudad Juárez : les serial killer, des trafiquants d'organne, des barons de la drogue, des maris violents, des voleurs, des producteurs de snuff movies (La mort en direct revendue en vidéo).


Sergio Gonzales Rodriguez conclue dans son article que : « Les meurtres en série de Ciudad Juárez mêlent l’atmosphère trouble de la frontière et ses milliers de migrants, ses industries de sous-traitance, la faillite des institutions et aussi la violence patriarcale, l’inégalité, les négligences du gouvernement fédéral, etc. Mais, par-dessus tout, cette ténébreuse affaire révèle la toute-puissance des narcotrafiquants et la solidité de leurs réseaux d’influence. Les liens entre le milieu criminel et les pouvoirs économique et politique constituent une menace pour l’ensemble du Mexique. ».


Le principal suspect reste peut être la ville elle-même.

Les visages de filles disparues apposés sur les murs et les vitrines font partie du décor, comme les croix roses des collines de Cristo Negro.

Si le président Vicente Fox n'a rien fait, le nouveau président Felipe Calderón s'attaquera peut être au problème sous la pression de l'opinion publique internationnale. C'est certainement le but premier du réalisateur du film Les Oubliées de Juarez. Donc maintenant en spectateur averti allez voir le film. Toujours selon les critiques, je n'ai pas vu le film, je vous promet rien.


http://www.monde-diplomatique.fr/2003/08/GONZALEZ_RODRIGUEZ/10315#nb6

http://www.lacitedesmortes.net/


jeudi 19 avril 2007

La défiance

Dernière ligne droite avant le premier tour de l’élection présidentielle, la défiance règne et quatre candidats semblent se détacher (du moins dans les sondages). La défiance est le thème dominant pour Jérôme Jaffré directeur du Centre de recherches politiques de Sciences Po qui écrit un article dans supplément Présidentielle 2007, du 18 avril 2007, du journal Le Monde.
Petits rappels, en 1988 nous avions droit à la « France unie », en 1995 la « fracture sociale », en 2002 l’ « insécurité ». Selon Jérôme Jaffré, cette année ce serait la « défiance » envers la gauche et la droite.
Les français déclarent de plus en plus ne faire confiance ni à la gauche ni à la droite pour gouverner le pays. Le mécanisme de la confiance est au cœur des institutions de la Ve République surtout depuis l’instauration du suffrage universel en 1962 et du suffrage majoritaire en 1988, censées favoriser la bipolarisation.

Faut il donc parler d’ « intégrés » au systèmes politique qui votent à gauche et à droite, d’ « hors système » qui refusent le clivage gauche droite et de « défiants » qui l’acceptent mais ne font confiance ni à la gauche ni à la droite ?
Les « indécis »se trouveraient-il donc dans ces défiants ? Ces fameux indécis voire que l’on appellent aussi flottants apparaissent au dernier moment comme déterminants. Les présidents d’instituts de sondage répètent en vain dans les médias que finalement, il peut y avoir des surprises à cause des défiants. [Ils ont tellement peur qu’on se rendent compte que les sondage d’opinion s’apparentent plus à de la magie qu’à de la science. Il faut savoir que nous sommes le dernier pays avec les pays sous développés à utiliser la méthode des quotas ... (Voir http//:polytricksss.blogspot.com, Quand les instituts de sondage gouvernent)].

Le clivage gauche droite ne semble plus être imposé par une constitution faite sur mesure pour un homme en 1958. Même si je suis favorable à une VIe constitution la faute ne lui revient pas entièrement.

Les partis politiques ne sont-il pas aussi fautifs ?
La définition d’un parti politique est celle-ci : groupe social, organisation qui sollicite le soutient de la population en vue de l’exercice direct du pouvoir. Il doit dépasser l’influence personnelle de ses dirigeants. Le fondement des partis est avant tout leur idéologie et leur idée politique.
Si l’on considère que l’opposition entre la gauche et la droite est une relation de concurrence, mais d’une symbolique homologue, représentative de la lutte sociale dans la société. Les partis politiques sont-ils encore représentatifs des classes sociales ?
Surtout quand d’un coté la lutte des classes se transforme en lutte des « races » et d’un autre coté les classe sont des lobbies ou des syndicats, ne faut-il pas dire : Mr Le Pen, Mr De Villiers, Mr Nihous, Mr Schivardi, Mr Bové, Mme Voynet vous êtes priés de libérer l’échiquier politique ?

Le champ politique fonctionne comme un marché de la compétence de diriger, avec une offre et une demande. Les partis politiques représentent l’offre. Dans cette philosophie économiste, les partis politiques appliquent des pratiques propres à l’univers marchand. Il existe un marketing politique. Les partis politiques ne fonctionnent plus avec des convictions, des valeurs. Ils résonnent en forme de créneau, de clientèle électorale et d’opinion publique.

Les frontières entre eux ne se différencient pas nettement. Les idées demeurent moins stables voire contradictoires.
Nicolas Sarkozy, l’homme de droite ratisse très large et évoque une politique économique libérale tout en prônant les acquits sociaux et en chassant sur les terres du Front Nationale. Ségolène Royale affirme qu’elle n’a pas « besoin d’étiquette quelle est dans le socialisme du XXIe siècle », elle ne veut pas d’un gouvernement 100% Parti Socialiste mais composé de tout ceux qui se reconnaîtront dans son pacte présidentielle calqué Tony Blair et l’UMP. François Bayrou lui pioche à gauche à droite suivant la tendance, son public, son humeur … Mais il envisage la création d’un nouveau parti après son élection « pour porter ce nouvel espoir et cette grande responsabilité… Il faudra un grand parti démocrate pour la France » (voilà un début de réponse, reste à trouver les partisans). Jean-Marie Le Pen se bat en retour avec Nicolas Sarkozy. (Je le replace sur l’échiquier. Je l’avais subjectivement vite supprimé. Même si il cultive un culte de la personnalité dont personne à idée, une idéologie existe. Ses 17% aux dernières élections démontrent qu’il a sa place.)
Seul trois candidats restent fidèles à leurs idées mais ils chassent sur le même terrain. Olivier Besancenot, Marie Georges Buffet et Arlette Laguiller restent bien souvent utopiques mais ont le mérite d’avoir une idéologie stable et se positionnent en marge du système politique devenu économiste.

Pour en revenir aux défiants, la crise politique est devenue générale associant les classes moyennes aux catégories populaires et s’étendant désormais aux couches intellectuelles (Où sont passés les leader d’opinion ? Ce sont-ils tous transformés en suiveur ?).

Cette montée de la défiance risque bien de favoriser le candidat de L’UDF, « mais il ne pourra diriger le pays pendant cinq ans à partir d’une telle motivation. Il y a pour les trois grands postulants à la victoire, matière à réflexion sur les profondes réformes politiques nécessaires à la bonne gouvernance du pays.

Citoyen à vos bulletins

Quand les instituts de sondages gouvernent.

Les instituts de sondages sont devenus une véritable industrie extrêmement lucrative. Il existe plus de 200 entreprises privées qui s’occupent de sondage d’opinion. Même si leurs principales activités restent les études de marché, les sondages d’opinion prennent une place de plus en plus significative.
Ils réalisent de nombreux sondages d’opinion pour les partis politiques qui ne sont pas rendus publiques. Ils forment la partie immergée de l’iceberg. Tous les jours les dirigeants de parti politique lisent leurs derniers sondages commandés aux instituts. Ceux qui sont diffusés dans les médias aussi nombreux qu’ils soient ne sont que la partie visible de l’iceberg.

Il existe une étroite connivence entre les instituts de sondage la politique et le patronat. Ce n’est pas pour rien que Laurence Parisot est la présidente du Médef. Il était une fois où c’était les patrons de la métallurgie sidérurgie (Ernest Antoine de Seillière) qui gouvernaient mais ce temps est résolu. Maintenant ce sont les patrons d’instituts de sondage. Laurence Parisot dirige l’IFOP (l’institut français d’opinion publique).

Il faut comprendre que les instituts de sondage gouvernent de façon manichéenne les politiciens et les médias. C’est une sorte de cercle vicieux entre médias, politicien, patronat et instituts où les derniers tirent le mieux leur épingle du jeu.
Pour se faire connaître des entreprises privées, afin de réaliser des études de marché, les instituts de sondage doivent êtes présents dans les médias. (D’où l’assignation du nom avec le sondage). Les médias payent chèrent des sondages qui leur apporte de l’encre à leur moulin et aussi de la publicité dans des médias concurrents (toujours en référence de l’obligation d’assigner l’institut de sondage mais aussi le commanditaire. Le journal du dimanche peut se faire de la publicité indirecte dans Le Monde). Les politiciens croyant au 4éme pouvoir des médias sont devenus des accros aux sondages. Ils se fient aux sondages et adaptent leur politique sous leur influence. Les entreprises privées, elles attendent le résultat des élections présidentielles et comparent avec les « pronostiques » précédents des différents instituts pour faire leur choix. Mais c’est sans savoir que le soir du premier tour et du deuxième tour, les plus grands instituts de sondage se téléphonent avant les résultats définitifs pour arranger les chiffres et éviter de trop se tromper. Si il y a un écart important avec les résultats finals, ils se seront tous tromper et pourront accuser les gens d’avoir été trop « flottant ». Si ils sont proches, ils gagnent de la crédibilité.

Une définition de sondage est nécessaire. C’est « une technique statistique qui permet de connaître certaines informations sur une population mère de référence se contentant d’étudier un échantillonnage représentatif constitué par un sous ensemble de la population déterminée soit au hasard soit en fonction de caractéristiques particulières ».
Le sondage atteint une réelle fiabilité à partir de 1000 personnes interrogées et doit se faire dans un temps relativement court. Il existe deux méthodes.

La méthode aléatoire consiste à tirer dans une base de données au hasard (Tout les 100 par exemple) les personnes que l’on veut interroger. La méthode comporte une incertitude. Il faut attribuer un correctif de plus ou moins trois pourcent (3%).
La méthode des quotas construit un échantillonnage représentatif de la population mère en utilisant des critères. Le recensement permet de connaître la population et les instituts se basent dessus. Le panel représentatif est composé avec quatre critères : le sexe croisé de l’age, la catégorie d’agglomération, la profession ou l’ancienne profession du chef de famille et le niveau d’étude. Il faut donc téléphoner jusqu’à que les gens interrogés représente le panel construit. (Cela peut prendre du temps quand il faut trouver une femme, chef d’entreprise dans une agglomération de moins de 50 000 habitants.)
Plusieurs critiques peuvent être formulées. Elle n’a aucune valeur scientifique cela a été prouvé mais on continue à l’utiliser en France et dans les pays sous développée. Tout les autres pays utilisent la méthode aléatoire.
Deuxièmement les critères choisis sont-ils pertinents ? Le sexe est un critère biologique qui n’a pas de poids dans notre comportement électoraux et n’a pas de représentativité générale. La coupure en classe sociale est plus pertinente, surtout si on se veut « néo marxiste » ou « bourdieusien », mais devient de moins en moins prégnant.

De façon plus générale, les sondages sont faits au téléphone et représentent donc les intentions de vote des personnes ayant un téléphone fixe. On demande une anticipation d’une action future, il est donc compréhensible que plus l’on avance dans l’échéance et moins ils ont de chances de se tromper. Les sondages ne représentent qu’une tendance du moment auquel il a été réalisé. Deux jours plus tard, il ne vaut plus rien. De plus ils ne sont que l’interprétation des instituts de sondages.

Une question scientifique se pose aussi. Il faudrait faire confiance et croire sur bonne foi des instituts de sondages qui refusent de divulguer leurs données brutes. Les méthodes utilisées répondent de la statistique mais une expérience scientifique ne se doit pas d’être reproduite dans les mêmes conditions par autrui pour être vérifiée. Même si elle est falsifiée, elle peut être acceptée faute de mieux. C’est le principe de la falsification. Les instituts semblent quand même avoir peur de dévoiler leurs données brutes.

Les instituts de sondage règnent en maître sur le patronat engendrant de l’argent et font la pluie et le beau temps dans les médias et la politique.

mardi 10 avril 2007

Sénèque assis dans le salon de Néron…

Je ne pensais pas écrire un post sur Nicolas Sarkozy.

Etant déjà surmédiatisé, s’invitant tous les jours dans les informations de toutes les presses, écrites, parlées, photographiées, numérisées, je ne voyais pas quel place il aurait dans ce blog,
Il s'y est donc invité de façon tout à fait néfaste pour sa personne (n'en déplaise pas à moi même, sinon je n'en rapporterais pas ses propos) par un entretien avec Michel Onfray le mardi 20 février 2007.

Michel Onfray décrit sur son blog, cette rencontre, Place Beauvau à l'époque, comme « Sénèque assis dans le salon de Néron ».

Lors de cette rencontre, Sarkozy déclare : «J’inclinerais pour ma part à penser qu’on naît pédophile, et c’est d’ailleurs un problème que nous ne sachions soigner cette pathologie-là. Il y a 1200 ou 1300 jeunes qui se suicident en France chaque année, ce n’est pas parce que leurs parents s’en sont mal occupés ! Mais parce que génétiquement ils avaient une fragilité, une douleur préalable. Prenez les fumeurs : certains développent un cancer, d’autres non. Les premiers ont une faiblesse physiologique héréditaire. Les circonstances ne font pas tout, la part de l’inné est immense »

Il faut donc comprendre que «le mal existe comme une entité séparée, claire, métaphysique, objectivable, à la manière d’une tumeur, sans aucune relation avec le social, la société, la politique, les conditions historiques».

Nous naissons donc bons ou mauvais quoi qu'il arrive. Nous ne pouvons échappé à notre destinée, tout est réglé par la nature.

Le suicide, la violence, les faiblesses physiologiques, la délinquance, la pédophile, le meurtre ... seraient innés, et même plus génétiquement présent, chez une personne.
J'ai peut être un de ces gènes en moi sans le savoir mais Nicolas Sarkozy lui le sait.
Ca me fait penser à «Minority Report», le film de Steven Spielberg.

L'un des plus grands généticiens du monde, Axel Kahn (même si son frère, Jean François Kahn,est rédacteur en chef de Marianne, journal ouvertement de gauche et anti Sarkozy), sort de sa réserve qualifiant de «stupides» les propos de Nicolas Sarkozy,

Pour éclairer sa pensée aussi simpliste quelle soit, Michel Onfray lui a offert quatre livres :

Surveiller et punir de Michel Foucault ; L’Antéchrist de Nietzsche ; Totem et tabou de Freud et Qu’est-ce que la propriété ? de Proudhon.

Bonne lecture Mr Sarkozy

http://philomag.com/article,dialogue,nicolas-sarkozy-et-michel-onfray-confidences-entre-ennemis,288.php
http://michelonfray.blogs.nouvelobs.com/archive/2007/04/03/le-cerveau-d-un-homme-de-droite.html

mardi 3 avril 2007

Le pouvoir se partage-t-il (Part 2)

Le cas de la Côte d'Ivoire


En effet Laurent Gbagbo ne semble pas faire des concessions pour le plaisir. (Non loin de voir des complots partout, c’est plutôt très stratégique). Petits rappels historiques.

L’ère Houphouët-Boigny

La Côte d’Ivoire devient indépendante le 7 août 1960. Le premier président de son histoire est Félix Houphouët-Boigny. Il restera au pouvoir 33 ans. Houphouët-Boigny est très proche de la France, plutôt de gauche, proche de François Mitterrand. (Il a quand même fait toutes ses armes politiques en France en étant ministre délégué à la présidence du Conseil du gouvernement de Guy Mollet en 1956, ministre D’Etat sous Maurice Bourgès-Maunoury puis de Pierre Pflimlin, puis de Charles de Gaulles, puis de Michel Debré. Il participa activement à l’élaboration de la Ve République). On peut le qualifier d’un parfait fonctionnaire. Les gouvernements passent, lui reste. Il n’est donc pas arrivé au pouvoir par hasard. La France a placé un de ses meilleurs éléments qui pourra être maîtrisé et manipulé et déjà dévoué à sa cause. Grâce à une politique libérale, le pays devient prospère. Comparé au autre pays décolonisé, c’est l’un des seuls qui connaît une réelle réussite économique. On parle de « miracle ivoirien ». Le président est respecté gagnant les surnoms respectueux de « Vieux » et de « Sage de l’Afrique ». Mais l’économie va connaître des problèmes à la fin des années 80 avec l’écroulement du cour du cacao (l’une des grandes richesses de la Côte d’Ivoire). La corruption et les inégalités sociales règnent. A l’élection de 1990, le pluralisme politique devient légal (Avant on préférait l’injustice au désordre) mais il gagne quand même les élections face à un certain Laurent Gbagbo avec 84% des suffrages. Le Président mort en 1993 d’un cancer.

L’ivoirité

L’accession au pouvoir sera très disputée entre Henri Konan Bédié, Robert Guéï, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara.

Les élections de 1995 voient remportées Henry Konan Bédié avec 96,44 % des suffrages, élections boycottées par Gbagbo. La question d’ « ivoirité » est mise en scène. Le Sage s’était battu pour une unité nationale entre les différentes ethnies (même si il favorisait les baoulés). Bédié est renversé par un coup d'État orchestré par le militaire Guéï, le 24 décembre 1999, venu « balayer la maison », « Nous sommes venus pour faire au mieux pour que les ivoiriens puissent effectivement orchestrer la bonne politique qui puissent être dans l’intérêt supérieur du pays, pour le bonheur du peuple et pour le salut de la République ». Tiken Jah Fakoly chante encore « Militaire Guéï tu nous avais promis rappelle- toi, rappelle toi » et « l’éléphant annoncé est arrivé avec un pied cassé ». En 2000 des élections sont effectivement organisées qui opposent Guéï contre Gbagbo ayant écarté Alassane Ouattara parce qu’il n’était pas de nationalité Ivoirienne (même si il a été 1er ministre de Houphouët-Boigny). Gbagbo devient président.

Le 19 septembre 2002, un coup d’Etat est tenté par des rebelles venus du Burkina Faso. Les rebelles échouent mais une guerre civile éclate. Le pays est divisé en deux. De nombreuses tensions sont présentes entre les « rebelles », le gouvernement, la force Licorne déployé par la France et les casques bleus déployés par l’ONU notamment la manifestation des 6 et 9 novembre 2004. Les accords de Marcoussis ne sont pas respectés. Un accord politique semble donc avoir été trouvé ces derniers jours avec la nomination de Guillaume Soro chef des « rebelles » au poste de Premier ministre.

Gbagbo prépare les élections

En effet, les élections devaient déjà se dérouler l’année passée. Gbagbo a gagné un an prétextant une instabilité dans le pays. L’ONU l’avait lâchement autorisé en prolongeant Charles Konan Banny, l’ancien Premier ministre en novembre 2006 par la résolution 1721 lui donnant des pouvoirs élargis pour faire avancer le processus de paix et d’organiser des élections d’ici octobre 2007.

Avec la nomination de Guillaume Soro, Gbagbo pense se faire oublier sur le plan international, virer l’armée française et les casques bleus et être maître de la maison. Soro n’est qu’un syndicaliste peu puissant et toute cette stratégie semble être fait pour affaiblir les houphouétistes (Bédié et Ouattara) et être réélu tranquillement. Les houphouétistes s’agitent ces dernières semaines et oublient les querelles internes un moment pour rester dans les institutions et ne pas être isolés. Ils prennent des conseils et mettent la pression auprès de présidents étrangers (souvent des amis proches) (Wade, Tandja, Kufuor, Bongo, Chirac, à l’ONU…) et auprès de Soro.

Venant au secours de ces amis, Bongo propose « Suspension de la constitution, cohabitation de deux ans avec Gbagbo comme chef de l’Etat, Ouattara comme vice président, Bédié président d’une assemblé constituante chargé d’effectuer une nouvelle constitution et Soro, Premier ministre. » Mais ce n’est qu’un écho de Libreville qui résonne bien loin.

Même si les Forces Nouvelles se place sur l’échiquier politique ivoirien, le poste de Premier ministre semble bien être un cadeau empoisonné. Il lui faut encore arracher les pouvoirs à Gbagbo. Guillaume Soro n’est pas un technicien comme ces prédécesseurs. Mais ce semblant de paix s’apparente plus à une stratégie politique en isolent les adversaires. Laurent Gbagbo semble dorénavant prêt à faire face à n’importe quel candidat.

Le Népal ???

Une autre brève vient alimenter la question principale. A la lutte et la répression, beaucoup de gouvernement semble préférer les concessions.
En effet au Népal, cinq ministres maoïstes rentrent dans le gouvernement.
"Cela constitue une première dans ce pays où la lutte armée entamée en février 1996 par les guérilleros maoïstes a fait 13 000 morts. "C'est un jour historique pour le Népal", a estimé le chef maoïste Prachanda. "Un nouveau processus pour bâtir un nouveau Népal a commencé et notre responsabilité s'en trouve renforcée", a-t-il ajouté."

Mais à quelle fin ces concessions sont elles réalisées?